Les landes sèches

Elles sont nées de la main de l’homme et si longtemps l’ont servi. Réduites en cendres, elles devenaient engrais. Jeunes, renaissantes, elles nourrissaient les troupeaux pour ensuite, enfin matures, offrir leur nectar aux abeilles et voir leurs fruits cueillis par les femmes et les enfants. Maigres services, il est vrai, que seule la pauvreté d’alors rendait inestimables. L’homme d’aujourd’hui, riche, peut enfin les abandonner. Ne dit-on pas « r’toûrner a breyîres » en parlant d’un sol inculte, d’une terre qui redevient sauvage?

Un jour, peut-être, seuls quelques villages, qu’ils soient Sart ou Ster, porteront le nom du souvenir.

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Délicieuses ! C’est un qualificatif qu’il leur sied à merveille. Délice des yeux, lorsque, à la fin de l’été, éclate la parure de la callune. Délice du palais quand les myrtilles fondent dans la bouche des gourmands. Délice auditif aussi, au printemps, tandis que monte le chant de ses hôtes. Douceur des graminées que les doigts effleurent au passage. Subtilité des parfums… Tous les sens du fagnard sont aux aguets lorsqu’il traverse ces landes.

Dominées par des arbustes de la famille des éricacées, les landes sèches rythment la fagne de leurs couleurs saisonnières. Au printemps, ce sont les verts tendres des feuilles des myrtilles qui dominent. Plus tard, le glauque particulier de la myrtille de loup annonce la venue prochaine du rose des sépales de la callune. En hiver, les feuilles vertes des airelles continuent à luire tandis que la molinie, dorée, se couche.

Les landes sèches à callune et myrtille.
Une lande est un paysage ouvert, dominé par des sous-arbrisseaux et des arbrisseaux. Les landes à callune et myrtille se rencontrent sur des sols acides, relativement secs, en lieu et place des forêts. Elles se trouvent donc là où l’homme est intervenu : abattage des arbres puis utilisations agro-pastorales par essartage, sorte de culture sur brûlis, fauchage pour obtenir une litière ou pâturage. Les landes sèches sont donc le résultat de la destruction d’habitats forestiers. Cependant, quelques lambeaux de landes, sur des sols très pauvres, ingrats, en bordure des tourbières, sont des landes primaires, naturelles. Ce sont elles qui ont produit les semences et permis la colonisation végétale des milieux ouverts par les activités anthropiques.


Ces habitats abritent une faune variée et notamment de nombreux insectes. Partant, les insectivores y sont bien présents et plus particulièrement les oiseaux durant la saison de nidification. En l’absence d’arbres, ce sont les espèces d’oiseaux qui nichent au sol, ou dans des buissons bas, que l’on va y rencontrer : tarier pâtre, pipit farlouse ou locustelle tachetée par exemple.

D’autres oiseaux, concernés par Natura 2000 et repris dans les annexes de la Directive de 1979, vivent dans ces landes : hibou des marais, tétras lyre et engoulevent d’Europe apprécient ces lieux ouverts pour s’y cacher, y nicher ou chasser.

Quelques plantes indicatrices:

Voici quelques plantes caractéristiques de la lande sèche. Ce sont toutes des éricacées.




La callune, Calluna vulgaris, aussi nommée bruyère commune, est une plante très mellifère. Son calice, rose, est plus long que la corolle de même teinte. Un calicule très petit simule par ailleurs un calice. Une fleur à mettre sous la loupe, vraiment !

La myrtille commune, Vaccinium myrtillus, porte des fruits à la pulpe rouge, que ma grand-maman spadoise cuisinait, autrefois, liés d'un peu de farine, en un savoureux "laudin", sorte de marmelade.

La myrtille de loup, Vaccinium uliginosum, a, quant à elle, des baies à chair blanchâtre, insipide.



L’airelle, Vaccinium vitis-idaea, est la seule des trois myrtilles de la lande sèche à avoir des feuilles persistantes et des fruits rouges.

Sur le plateau fagnard, les landes sèches présentent différentes variantes selon le degré d’humidité du sol et l’épaisseur de la couche de tourbe. Les tourbières en voie d’assèchement, par exemple, et notamment dans la fagne de Cléfaye, verront la camarine noire, Empetrum nigrum, se mêler aux éricacées.

Enfin, dans ces landes fleurissent aussi d’autres espèces moins typiques : le gaillet du Hartz et la potentille tormentille s’y épanouissent. Les trouées sont souvent colonisées par des mousses et des lichens.

Mesures favorables aux landes sèches.

Les menaces résultant de la mise en culture ou de la plantation forestière et l’abandon des anciennes pratiques agro-pastorales, ont amené une nette régression des étendues de landes sèches.

De surcroît, sans une gestion conservatoire, cet habitat disparaîtrait sous la dynamique de l’évolution naturelle du paysage : la forêt reprendrait ses droits, inexorablement.

Le maintien de cet habitat, et de toute la vie qui y est associée, implique donc la mise en application d’une série de mesures qui vont de l’abattage des arbres à l’entretien par fauchage ou pâturage extensif. Dans certains cas, une phase de restauration verra jour avec un décapage: il s’agit alors de racler le substrat, sur quelques centimètres de profondeur. Ce type d’opération a été mené sur grande échelle, depuis une dizaine années, notamment dans le cadre des projets « LIFE » successifs. On peut en voir les résultats en de nombreux endroits, notamment du côté de Duret, en Fagne Wallonne, à Cléfay, dans le Kutenhart, etc…

Texte et photos: A. Pironet.
Extrait de "Hautes Fagnes"

Bibliographie :

J.Lambinon, L. Delvosalle, J. Duvigneaud – Nouvelle Flore de la Belgique, du Grand-Duché de Luxembourg, du Nord de la France et des Régions voisines – Cinquième édition – Edition du Jardin botanique national de Belgique – 2004
J-C. Rameau, C. Gauberville , N. Drapier – Gestion forestière et diversité biologique – Wallonie - Grand-Duché de Luxembourg – 2000
Ph. Frankard, P. Ghiette et R. Schumacker – Les réserves naturelles domaniales des vallées de la Schwalm et de l’Olef – DGRNE - 1999
R. Collard, V. Bronowski - Le guide du Plateau des Hautes Fagnes– L’Octogone – 1993

Sites Internet consultés

Amisdelafagne - Janvier 2006

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