Ce passé se situe dans le contexte historique général des régions entre Meuse et Rhin.
L'EPOQUE PREHISTORIQUE
Les temps préhistoriques ont laissé peu de traces décelées à ce jour. En raison de son climat et de son sol très inhospitaliers, la région des Hautes Fagnes a dû connaître un peuplement des plus limité; on ne l'imagine, en fait, que comme une zone de passage ou de refuge momentané.
L'EPOQUE CELTIQUE:
Le peuplement périphérique des hauts Marais apparaît plus tangible à l'époque celtique, comme en témoignent notamment les camps-refuges fortifiés du Tchession de Xhoffraix et du Tchession de Walk, divers toponymes et certains chemins d'origine anté-romaine probable.
L'EPOQUE ROMAINE:
Au premier siècle de notre ère apparaissent aux approches du Haut Plateau des « vici » (bourgades) et des « villae » (domaines agricoles) : Theux, Konzen, Amblève, etc.
Il est normal que des voies et chemins franchissent cette région pour relier les divers centres de peuplement. De toutes ces routes, on peut mettre en exergue celle dénommée (à tort ou à raison) « Via Mansuerisca ». Sa romanité, longtemps affirmée, fut mise en doute par des études effectuées entre 1977 et 1985 ; on la considéra comme mérovingienne. Des recherches plus récentes, menées en 2004, permettent d’affirmer que cette voie fagnarde a pu être aménagée à l’époque du Bas Empire romain, vers le début du IVe siècle.
LA « FORESTA » ROYALE
A l’époque mérovingienne, la région des Fagnes devient « foresta » royale, c’est-à-dire le patrimoine personnel du souverain, comportant principalement le droit régalien de chasse.
A partir du VIIe siècle, on va assister au morcellement progressif de la souveraineté royale sur le Haut Plateau et à la formation de principautés qui le borderont peu à peu de toutes parts.
STAVELOT – MALMEDY
C’est ainsi qu’en 648, Sigebert III, roi d’Austrasie, concède à saint Remacle le territoire de l’abbaye de Stavelot-Malmedy. En 670, Childéric II, roi d’Austrasie et de Neustrie, confirme cette donation, tout en la réduisant notablement.
Le domaine de l’abbé de Stavelot-Malmedy, plus tard prince-abbé dépendant du Saint Empire romain germanique, va couvrir, en région fagnarde, la partie sud-ouest du Haut Plateau.
LIEGE
Une autre principauté va occuper la partie nord-ouest du Haut Plateau. En 898, Suentibold, roi de Lotharingie, fait donation au Chapitre de Saint-Lambert à Liège du « fiscus » de sa villa de Theux, dont la limite sud s’inscrit au long du territoire des Hautes Fagnes. Il se réserve toutefois le droit de « foresta ».
Quelque temps plus tard, en 915, Charles le Simple, roi de Francie occidentale et suzerain de la Lotharingie, abandonne à l’évêque de Liège son droit de « foresta » sur le domaine de Theux.
LIMBOURG
Vers le milieu du Xe siècle, un troisième seigneur s’installe dans la portion nord-ouest des Hautes Fagnes. En effet, entre 895 et 939, le ban de Baelen, villa royale de la Lotharingie, qui comprend notamment le Hertogenwald, sort du domaine de la couronne et passe sous la dépendance du comte de Luihgau ; le souverain conserve cependant le droit de « foresta ». Il n’empêche que, dès avant 960, ce même comte de Luihgau se trouve également en possession du droit de « foresta » sur le Hertogenwald.
Aux environs de 1050, le démembrement du comté (« pagus) de Luihgau entraîne la création du comté (puis duché) de Limbourg par Frédéric II de Luxembourg.
Il faut noter qu’en 1288, après la guerre de succession limbourgeoise (bataille de Worringen), le duché de Limbourg fut placé sous la suzeraineté du duché de Brabant et suivit, dès lors, ses destinées politiques et dynastiques.
MONTJOIE – BUTGENBACH
La partie sud-est du plateau fagnard va, elle aussi, faire l’objet d’une appropriation politique. En cet espace désert, inclus à l’origine dans la « foresta » royale, se développent, à l’époque franque, deux villas, celle de Konzen, de création romaine (futur pays de Montjoie, dont le burg est fondé vers 1198) et celle de Butgenbach, qui, au XIIe siècle, dépendent de la Maison de Limbourg, mais sous forme d’une dynastie autonome, celle des seigneurs de Montjoie-Butgenbach.
LUXEMBOURG
En 1451, la Seigneurie de Butgenbach passe sous la mouvance du duché de Luxembourg.
JULIERS
De son côté, la seigneurie de Montjoie fait partie, dès 1435, du duché de Juliers.
Photo R. Herman - Borne Juliers/Luxembourg
DE LA FIN DE L’ANCIEN REGIME A L’EPOQUE CONTEMPORAINE
En 1795, l’annexion française, qui durera jusqu’en 1814, entraîne la suppression de toutes les frontières politiques anciennes.
Après le Congrès de Vienne (1815), un traité de 1816 détermine les limites entre les Pays-Bas et la Prusse, qui se partagent le domaine fagnard.
Au lendemain de la proclamation de l’indépendance de la Belgique (1830), un traité de 1839 définit la frontière entre notre pays et la Prusse, qui suit le même tracé que celui de 1816.
En 1919, le Traité de Versailles restitue à la Belgique les territoires des « Cantons de l’Est », qui faisaient partie de la Prusse depuis le Congrès de Vienne.
LES VILLAGES FAGNARDS
Si, pendant des millénaires, le Haut Plateau a joué le rôle d’un territoire de chasse, c’est seulement à l’époque du Moyen Age que les paysans vinrent tirer subsistance de ses ressources.
On situe généralement la naissance de la vingtaine de villages fagnards entre les Xe et XIIIe siècles.
Jusqu’au début du XXe siècle, leur vie économique va s’appuyer en partie sur les ressources des forêts, landes et fagnes voisines.
Avec le développement de la région, la plupart de ces activités traditionnelles ont pris fin.
Texte V. Bronowski.